grande interview Anicet BONGO

Grande interview de Djo’obani-Bongo rock Anicet, fils d’Omar Bongo Ondimba

« Cela faisait plus de 8 ans que je n’avais pas eu accès à ce mausolée suite au climat politique délétère. »

Au cours de la visite du mausolée dédiée à la mémoire de feu son excellence Omar Bongo Ondimba, le Président de la Transition, Brice Clotaire OliguiGuema a eu un entretien avec les enfants du disparu. Cette visite symbolise la passation réelle de pouvoir entre les Bongo et l’équipe de la transition emmenée par le Général Oligui. Occasion pour nous d’arracher les premiers mots d’un fils d’Omar Bongo notamment DJO’OBANI-BONGO Rock Anicet.

Bonjour Monsieur Anicet !

Que vous a dit le Général Oligui Guema au cours de cette visite ?

DJO’OBANI-BONGO Rock Anicet : Je tiens tout d’abord à remercier le Président de la Transition parce qu’il m’a permis à nouveau de franchir le seuil de la porte de ce mausolée. Bien que j’habite Franceville. Bien qu’il s’agisse de mon père. Cela faisait plus de 8 ans que je n’avais pas eu accès à ce mausolée suite au climat politique délétère.

Aujourd’hui je me sens enfin simple gabonais et c’est un soulagement. Parce que cela n’a pas été facile pour nous aussi. Mais je comprends parfaitement la douleur des gabonais durant cette difficile période et je mesure l’immensité de leur joie aujourd’hui. Cette joie de liberté, de vivre et de bonheur célébrée à travers le pays, je suis mieux placé pour le ressentir bien que portant le nom Bongo. Les choses ne sont pas toujours ce qu’on croit. Je prie pour que le nouveau président de la Transition apporte des sourires immenses sur le visage de chaque gabonais.

Pour revenir à votre question initiale, le Président de la Transition a essayé de nous expliquer la situation dans laquelle se trouve le pays afin d’éviter une mauvaise interprétation sur l’évolution de la transition. Il a tenu à nous rassurer comme il l’a fait pour tous les autres gabonais. La famille Bongo devient une famille ordinaire et bénéficie du même traitement que tous les autres Gabonais. Parce que le Gabon est au-dessus de tout.

Il nous a également invités à nous joindre à la dynamique de changement impulsée par l’équipe de la transition. De ne pas rester à l’écart et de nous joindre aux autres gabonais.

Quel est le sentiment général qui habite tous les enfants Bongo en ce moment ?

Je dois être honnête de vous dire que nous étions préparés à cela. Puisqu’il n’existe pas dans l’histoire du monde, un pouvoir éternel. Nous sommes conscients que depuis la prise du pouvoir le  30 Août par l’armée, c’est fini avec le régime Bongo. Un nouveau régime s’est mis en place avec le Général Oligui Guema. Nous espérons tous qu’il apporte des réponses aux espoirs des populations gabonaises, y compris les nôtres. Qu’il réussisse surtout à maintenir la paix dans tout le pays. La paix est l’héritage que nous a laissés mon père, le président Omar Bongo Ondimba.

Les Bongo, c’est fini pour un long moment. Nous devons faire profil bas et trouver d’autres axes de reconversion dans d’autres domaines d’activités et avancer avec le Gabon nouveau. Il y a beaucoup d’autres places à occuper et de choses à faire pour construire le Gabon nouveau.

Honnêtement Le 30 Août 2023, Dieu a décidé de donner une autre chance au Gabon avec l’arrivée au pouvoir du Général de Brigade Brice Oligui Guema. Il prend le pouvoir en gardant un pays uni et en paix. Il nous reste à travailler ensemble pour le reconstruire selon nos attentes.

Pour la grande majorité des Gabonais, les Bongo se sont réveillés- le 30 Août – brutalement d’un long rêve.

J’ai toujours eu le même rêve que la grande majorité des Gabonais. Mon rêve rejoint celui de tous les gabonais. Je rêve comme tous les gabonais d’un Gabon nouveau où tous les Gabonais seront plus heureux. Il y a va de l’avenir de mes enfants aussi. Un Gabon nouveau apportera du sourire à tous les Gabonais sans exception. Un Gabon où chaque Gabonais pourra se soigner, manger à sa faim, s’exprimer librement. Parce qu’au final, c’est un fardeau d’appartenir à une famille dite de « privilégiés ».  Des privilèges sont un écran de fumée qui tue – chez certains – les valeurs réelles de la vie que sont l’humilité, l’amour du travail, l’honnêteté, le respect, la vérité, la croyance en Dieu. Je remercie le très haut pour avoir été à l’abri de ce piège.

Je sais que notre pays à un fort potentiel dans tous les domaines notamment culturels, cultuels, économiques, humains et bien d’autres. Avec les nouveaux dirigeants, les gabonais seront à la hauteur des défis. C’est une opportunité que nous offre le Dieu tout puissant. J’aime bien l’expression utilisée par les communicateurs de l’armée dès Les premières heures de la prise de pouvoir : « c’est enfin notre essor vers la félicité ». En tant que simple gabonais, je suis prêt – et je l’ai écrit dans un récent article – à me mettre au travail pour prendre la place que je mérite dans ce nouveau Gabon.

En votre qualité de fils de chef d’Etat, de nombreux témoignages font état de  votre parcours exceptionnel comparé à certains de vos frères et sœurs.

Je vais garder ma personnalité et continuer ma vie sur le chemin qui a toujours été le mien sans honte ni crainte. D’autant plus que par le passé, mes frères et sœurs gabonais n’ont jamais manifesté de méchanceté à mon endroit de toute ma vie. J’en profite pour leur témoigner toute ma gratitude. Puisque j’ai pris l’habitude de visiter tous les milieux sans exception à travers le Gabon sans crainte. Je n’ai d’ailleurs jamais sollicité les services d’un aide de camp lors de mes déplacements dans le pays. La plupart de mes collaborateurs peuvent le témoigner.

Je n’ai jamais d’ailleurs occupé de hautes fonctions dans le pays. On peut le vérifier facilement dans les archives nationales. Aujourd’hui mon ambition n’est pas celle d’occuper de hautes fonctions. Je suis un homme d’affaires, un homme de culture, un homme de médias qui s’efforce à faire ce qu’il y a de mieux. Le plus important pour moi, c’est de travailler dans des domaines qui me passionnent, librement, de façon indépendante, rigoureuse et honnête.

Aujourd’hui j’ai 58 ans et j’ai pour objectif de continuer à travailler dans la paix avec mes compatriotes. Je porte le nom BONGO oui, mais je me suis battu à construire – à travers de nombreux projets – mon propre prénom. Il est temps de conforter ce travail. Je profite désormais de l’opportunité que m’offre la transition pendant laquelle le poids du nom Bongo ne pèsera plus lourd sur mon prénom et dans mes relations au quotidien.

Pour dire vrai, je ressens moins le poids du nom BONGO tout simplement parce que ma façon de vivre est simple. Je suis quelqu’un de très ouvert et j’aime des choses naturelles et modestes. La nature est mon compagnon. J’aurai pu vivre à l’étranger comme d’autres Gabonais. Mais je n’ai pas pu parce que je suis un peu trop villageois. J’ai du mal à passer plus de 15 jours à Libreville. Je me sens mieux au village, proche de la nature, des personnes modestes. Je ne sortirai du village que si je suis appelé à partager mes connaissances pour le bien de mon pays. Avec le changement de régime, notre objectif à tous, c’est d’accompagner le Président de la Transition à corriger ce qui n’a pas été fait pour placer le Gabon sur le chemin du développement pour le bien-être de tous les citoyens sans exception. Nous devons l’aider à rétablir la dignité des Gabonais et la splendeur du Gabon.

Quels sont vos domaines de compétences individuelles ?

Mes deux domaines de compétences sont l’informatique et la gestion des entreprises. Je suis ingénieur en informatique et j’ai également un Master en management et gestion des entreprises. Au regard de mes compétences et de l’expérience acquise sur le terrain, j’estime que le changement survenu à la tête du pays place chaque gabonais face à son propre destin. A propos de mon expérience, j’ai travaillé par le passé sur plusieurs projets. Il est temps de les mettre à profit pour le bien du Gabon. Et surtout pour que les générations futures de gabonais soient fiers de mes efforts. J’ai des idées en matière de bonne gouvernance, de genres d’affaires, de relations internationales, en matière de gestion des industries extractives. J’ai  travaillé sur ces projets en mettant à chaque fois en avant nos propres cultures et civilisations Bantu. Pour vous donner des indications précises, j’ai écrit une quarantaine de livres dont plus de 15 publiés. Histoire de laisser à nos enfants des bases de référence ou de réflexion leur permettant de faire mieux que nous.

Cependant les axes de mes activités futures sont la culture et la revalorisation de nos civilisations Bantu. Je me sentirais très à l’aise de me concentrer dans ces domaines afin de donner le meilleur de moi pour reconstruire l’image positive de notre pays. Le Gabon regorge de nombreux symboles culturels et traditionnels sur lesquels il faut travailler pour clarifier et mettre en exergue notre histoire réelle.

Le départ de votre père du pouvoir a été vécu avec douleur par les gabonais puisque malgré tout il était un père pour la majorité d’entre eux. Mais dès l’annonce de prise de pouvoir dans la matinée du 30 Août, on a assisté à une scène de liesse populaire. Une espèce de soulagement de voir partir les Bongo. Le Bilan d’Ali Bongo aurait-il noirci celui de votre père ?

Je ne vais pas entrer dans les détails puisque de toutes les façons, le pouvoir de mon frère aîné Ali Bongo est derrière nous. Le Gabon est en train d’emprunter une nouvelle voie. Personne n’est parfait. Nous sommes tous des pêcheurs sur terre. Personne n’est saint en esprit, en pensée et en actes, y compris moi. Je prône le pardon et l’apaisement. Face à toutes les épreuves de la vie, nous devons avoir de la compassion les uns envers les autres. Regarder de l’avant et essayer de faire mieux que nos prédécesseurs en changeant d’attitudes et de comportements pour éviter de tomber dans les mêmes erreurs. D’ailleurs la devise de notre pays, c’est trois mots : Dialogue – Tolérance – Paix. Cette devise devrait guider les actes de chaque gabonais pour qu’ensemble nous construisions un pays où il fait bon vivre pour chaque famille.

Quoiqu’il en soit  vous êtes sans ignorer que partir du sommet vers le bas n’a jamais été aisé. On l’a vu avec les enfants d’anciens chefs d’Etat africains qui finissent parfois dans la détresse.

Je suis d’accord pour la première évidence et non pour la deuxième. Nous – les enfants Bongo – devons-nous remettre en question et prendre conscience de la situation du pays. Nous n’avons pas une autre alternative que  de nous réunir pour faire le point et penser aux perspectives d’avenir. Il est question pour chacun de nous de redescendre sur terre pour devenir le Gabonais lambda et nous mettre à la disposition de la nation. Nous devons retrousser les manches et participer pleinement à la construction du nouveau Gabon. C’est vrai que lorsque la providence nous place dans une famille de privilégiés on se croit parfois invincible. Le fait que le nom Bongo n’ait plus la même résonnance qu’hier est un avantage puisque cela nous donne une occasion d’apprendre à vivre simplement afin de léguer à nos enfants un héritage solide.

Pour dire vrai, nous  – les enfants d’Omar Bongo – n’allons rien vivre de nouveau que nous ne l’avons fait il y a 15 ans. Durant tout le régime du grand frère Ali Bongo, nous n’avons reçu aucune assistance. Chaque enfant a compris que s’appeler Bongo n’offrait plus aucun privilège. Chacun s’est battu comme il pouvait pour redonner une autre signification à sa vie. En 15 ans, il y a eu dans chaque famille, un véritable retour à la simplicité et à l’anonymat. Cette transformation a été très douloureuse d’autant plus que l’héritage laissé par notre père n’a jamais été redistribué à aucun enfant.Donc la prise de pouvoir au matin du 30 Août n’a pas eu un effet négatif dans nos esprits. Au contraire, ce changement est porteur d’espoir pour tous les Gabonais